palustris a écrit:hickorie c'est juste que selon ta carte, ta pépinière se trouve dans la zone d'exclusion ??????
Non, elle est dedans. Je suis à Sainte-Catherine-de-Hatley et tout la MRC de Memphrémagog (dont fait partie Sainte-Catherine-de-Hatley) se trouve en zone d'inclusion.
perma a écrit:Implanter une espèce prédatrice, c'est travailler AVEC la nature pour tenter de contre-balancer un déséquilibre implanté par l'Homme, tandis que de forcer un isolement, c'est travailler CONTRE la nature. Si on dit, par exemple, qu'un arbre par 20 millions pourrait développer une résistance à la maladie, et bien si on plantait 1 million d'arbres par années, on réglerait le problème en vingt ans. Au contraire, si on n'en plante pas, la résistance ne se développera jamais et la maladie perdurera. Je simplifie à outrance ici, mais je crois qu'il faut encourager la nature à développer ses propres résistances.
Implanter une espèce prédatrice peut souvent s'avérer dangereux et hasardeux.
Quelques exemples :
La coccinelle asiatique a été introduite en Amérique du Nord et en Europe, afin de contrôler les populations de pucerons dont elle se nourrit avec voracité. Petit problème... Elle réduit la biodiversité des autres insectes aphidiphages par compétition pour les ressources, par prédation et par compétition directe intra-spécifique. Elle s'attaque également aux espèces autochtones de coccinelles. Mais, ce n'est pas tout. Elle réduit aussi la qualité des fruits dans les cultures de vergers. Elle est considérée invasive partout où on l'a implantée.
La carpe asiatique, introduite en Amérique du Nord dans les années 1970, constitue un fléau bien connu. On l'a amenée ici pour les besoins de l'industrie aquacole. Bien, entendu, au départ, ce n'était pas pour en faire une espèce prédatrice qu'elle a été introduite, mais c'est un peu ce qui s'est passé. En fait, ce n'est pas un grand prédateur - bien qu'elle s'attaque parfois aux poissons et aux mollusques indigènes - mais, par son comportement, elle a de grands impacts sur les macrophytes aquatiques et sur les macroinvertébrés qui vivent dans les fonds marins. Elle augmente le taux d'envasement et réduit la disponibilité en lumière. Tout ça a pour conséquence de faire disparaître progressivement les poissons indigènes.
L'escargot géant africain a été introduit dans plusieurs régions du monde. Cela se serait fait involontairement... Celui-ci cause plusieurs problèmes. Il consomme énormément de végétaux, il transmet plusieurs pathogènes et il altère la composition du sol. Cela a pour conséquence de nuire - grandement - à l'industrie agricole. Qu'est-ce qu'on a cru bon faire pour le contrôler ? Eh bien, on a tout simplement voulu faire de la lutte biologique en introduisant d'autres espèces d'escargots prédatrices. Cela s'est avéré relativement inefficace et a parfois eu des conséquences dramatiques sur des populations d'autres escargots autochtones.
Ce ne sont que trois exemples que j'ai utilisés ici. Quelques uns que je connaissais déjà... Mais, des cas catastrophiques, comme ceux-ci, où nous avons perdu le contrôle sur certaines espèces en ayant voulu travailler AVEC la nature, il doit y en avoir des centaines, voire des milliers. L'écologie, c'est en quelque sorte l'étude des liens entre les différentes espèces. Il y en existe tellement... Introduire une espèce exotique dans un milieu donné, ce n'est pas souvent un coup de pouce que nous donnons à la nature. À vrai dire, c'est très rare qu'il s'agisse d'un coup de pouce et un pourcentage élevé des cas documentés se sont finalement révélés catastrophiques plutôt que bénéfiques. Les conséquences se traduisent parfois par la perte d'espèces, par le chamboulement de l'équilibre naturel d'un biotope ou bien par la perte de millions ou même de milliards de dollars. C'est presque impossible de savoir ce qui va se passer lorsque l'on procède à l'introduction d'une espèce. Et personnellement, ce que j'aurais tendance à dire, c'est dans le doute, on s'abstient.
Tout ça pour dire que je crois que de fragmenter les endroits où on pourrait faire pousser le châtaignier d'Amérique au Québec serait une solution beaucoup plus sage qui comporte peu de risques. Tu dis que l'isolement du châtaignier d'Amérique s'est produit sur une très grande période et c'est vrai. Mais l'évolution des espèces s'est également fait sur des périodes tout à fait comparables. Implanter une nouvelle espèce est un chamboulement majeur pour l'écosystème local. Tout ça se fait en trop peu de temps et, selon moi, les choses ne sont pas supposées se passer ainsi. Et ce n'est pas parce que nous vivons à l'heure de la mondialisation que nous devons lancer la serviette.
perma a écrit:La seule chose qu'on peut faire, c'est de faciliter le développement d'une résistance en propageant les arbres qui semblent plus résistants.
Le problème, c'est que, en 110 ans, aucun arbre n'a montré de résistance. Ce n'est pas en prenant les semences sur des arbres non résistants qu'on risque de produire des arbres qui affichent une résistance. Tu auras beau en planter 20 millions (chiffre tout à fait arbitraire), s'ils sont issus d'individus non résistants, les chances qu'une résistance se développe sont à peu près inexistantes. De toute façon, le nombre de semences disponibles est ici problématique, étant donné que les individus qui produisent des châtaignes sont très rares.
Ce n'est pas de forcer un isolement que je propose, puisque l'espèce est absente du Québec. J'aimerais qu'on en plante des centaines, voire des milliers, mais qu'on le fasse de manière durable et si la maladie se pointe et crée un foyer d'infestation, eh bien, au moins, celui-ci risque d'être limité à une station. Et, pour être franc, tant les semences de la pépinière Casse-Noisettes que celles que la pépinière Arboquebecium utilisent sont issues d'arbres qui ne sont pas en contact avec la maladie présentement. Ce n'est certainement pas en prélevant des châtaignes sur des arbres non exposés à la maladie qu'une résistance pourra se créer... En tout cas, je n'y crois pas pour ce que j'en sais.